Chronique parue initialement dans Jukebox Magazine de mai 2019 numéro 389 !
Il
est des destins qui sont, pour le peu, hors du commun. Celui de
Gilles Bertin se situe pile poil dans cette catégorie. L’ancien
chanteur du groupe punk bordelais, Camera Silens, se raconte dans son
autobiographie. Ce combo, actif de 81 à 88, marque à jamais toute
une génération grâce à leurs hymnes « Pour La Gloire »,
« Réalité » ou encore « Classe Criminelle »
et leur participation au Chaos Festival à Orléans le 20 octobre
1984 qui permet de mettre en lumière la nouvelle scène punk/oi !
en Hexagone. Ils partagent les planches avec les Trotskids, Kidnap,
Komintern Sect ou autres Reich Orgasm qui font toujours le bonheur
des amateurs du genre. Cependant, beaucoup d’excès ont jalonné la
vie de ce groupe emblématique. Sida, drogues et autres délits comme
le spectaculaire casse de la Brink’s de Toulouse du 27 avril 1988,
auquel Gilles participe, signent le mandat d’arrêt de la vie
musicale de Camera Silens jusqu’en 2000 (reformation ponctuelle
sans Gilles). C’est à ce moment, qu’il démarre sa cavale de 30
ans en errant en Espagne, puis au Portugal où il ouvre une boutique
de disques (Torpedo), puis retour en Espagne, le tout grâce à
l’aide indéfectible de sa femme Cécilia qui le soutient coûte
que coûte malgré son passé et sa santé détériorée. Gilles
relate sa vie avec sincérité, sans langue de bois maniant
l’autodérision et l’humour au sein de ces 270 pages sans
concession, ni auto-complaisance. Une véritable plongée dans les
méandres d’une vie punk plus vraie que nature avec son lot de
joies mais aussi d’anxiétés dans les tréfonds abyssaux de son
âme. Jusqu’au jour de 2016 où Gilles décide de se rendre de lui
même aux autorités françaises afin d’être en concordance avec
l’homme qu’il est devenu. Autant vous dire que même sa
déposition est rocambolesque ! Une authentique autobiographie
qui fleure bon le holp-up littéro-punk, merci pour cette réalité
si brillamment contée. Alicia FIORUCCI.
chronique initialement parue pour Jukebox Magazine numéro 387.
GG
Allin, controversé, adulé, détesté, glorifié, bafoué,
cristallisé mais jamais ignoré. Notre homme a toujours su déchaîner
les passions et ce depuis sa plus tendre enfance. Pierre Avril et
Adeline Wall se sont penchés sur le plus dérangeant des personnages
du monde du punk rock du XXe sicècle. Dans cet ouvrage « GG
Allin, antéchrist de l’Extrême » sorti aux éditions Camion
Blanc, les auteurs tracent la route de Jesus Christ Allin (son vrai
nom!) depuis sa naissance au New Hampshire dans la cabane où son
père les tient, lui, son frère Merle et leur mère Arleta coupés
du monde sans réel contact avec l’extérieur jusqu’à sa mort
par overdose en juin 1993 à New York à l’issue d’un concert au
Gas Station. On y découvre que GG, en dehors d’Alice Cooper, des
New York Dolls et d’Aerosmith, était un grand fan de country :
Hank Williams, Johnny Cash, David Allan Coe et tous les « outlaws ».
On trouve au fil des pages, une discographie, non exhaustive (tant GG
fut prolifique), commentée par ces deux passionnés du plus
jusqu’au-boutiste artiste que le rock ait connu. Tous ses groupes
sont passés en revue : The Jabbers, The Scumfucs, The Texas
Nazis, The Cedar Sluts, The Criminal Quartet etc... sans oublier The
Murder Junkies (dans lequel Merle est bassiste) qui fut le dernier
groupe à avoir accompagné GG sur terre. Il avait une mission :
redonner au rock and roll le côté dangereux et rebelle des débuts
sans devenir un produit mercantile de l’establishment américain.
Les auteurs n’hésitent pas à comparer les performances scéniques
de GG, tant ces dernières étaient incroyables (automutilation,
bagarres avec le public, défécation …) à celles d’autres
acteurs de l’art contemporain tels que : Orlan, Chris Burden,
Marina Abramovic, Peter Sotos et bien d’autres... Ces 180 pages
mettent en lumière l’influence non négligeable qu’a laissé GG
dans le monde du punk et bien au-delà. Un livre à quatre mains
d’une sincérité sans faille dédié au Messie de la musique du
diable. Alicia Fiorucci